La valorisation des eaux non conventionnelles est un des leviers inscrits dans le plan pour optimiser la disponibilité de la ressource. La mesure 15 prévoit ainsi de lever les freins règlementaires à la valorisation de ces eaux notamment pour les usages domestiques, dans le respect de la protection de la santé des populations et des écosystèmes.
Par « eaux impropres à la consommation humaine » (EICH) on entend les eaux qui ne répondent pas à la définition des eaux destinées à la consommation humaine (eau potable).
Les eaux impropres à la consommation humaine encadrées par le code de la santé publique sont :
Les eaux de pluie issues des précipitations atmosphériques, collectées à l’aval de surfaces, inaccessibles aux personnes en dehors des opérations d’entretien ou de maintenance ;
Les eaux douces autorisées au titre des articles L. 214-1 à L. 214-6 du code de l’environnement ;
Les eaux des puits et des forages à usage domestique mentionnées à l’article L.2224-9 du code général des collectivités territoriales ;
Les eaux grises correspondant aux eaux évacuées à l’issue de l’utilisation des douches, des baignoires, des lavabos, des lave-mains et des lave-linges ;
Les eaux issues des piscines à usage collectif définies à l’article D.1332-1 du code de la santé publique, provenant exclusivement des opérations de vidanges complètes des bassins, des vidanges partielles liées à l’obligation de renouvellement d’eau journalier, des pédiluves et rampes d’aspersions pour pieds, ainsi que du lavage des filtres [dans les conditions prévues par l’arrêté du 7 avril 1981 modifié susvisé] ;
Des mélanges d’eaux impropres à la consommation humaine entre les eaux précitées afin d’être utilisés pour des usages, dès lors que les eaux composant le mélange sont autorisées individuellement pour ces usages. En cas de mélange, l’usage le plus contraignant détermine les critères de qualité et les conditions techniques à respecter en permanence.
Usages domestiques
Les usages domestiques de l’eau concernés sont :
Le lavage des sols intérieurs, le lavage du linge, l’alimentation de fontaines décoratives, l’évacuation des excrétas, le nettoyage des surfaces extérieures, dont le lavage des véhicules lorsqu’il est réalisé exclusivement au domicile, l’arrosage des jardins potagers, l’arrosage des espaces verts à l’échelle des bâtiments, dont les toitures et murs végétalisés et le remplissage des bassins d’ornement.
Ces usages sont issus des usages domestiques de l’eau définis à l’article R. 1321-1-1 du code de la santé publique.
Les établissements recevant du public sensible
Les établissements recevant du public sensible sont définis à l’article R. 1322-90 du code de la santé publique.
Certains établissements recevant du public ont vocation à accueillir du public sensible. Il s’agit de personnes vulnérables, que peuvent être des personnes malades ou en convalescence, des personnes dont l’immunité est fragilisée, ou encore des personnes âgées ou des enfants en bas âge (avant l’âge d’entrée à l’école maternelle). Pour garantir que les systèmes utilisant des eaux non potables à des fins domestiques dans les établissements recevant un public sensible (ERPS) respectent les exigences en matière de conception, de surveillance et d’entretien assurant la maîtrise des risques, leurs propriétaires doivent se conformer à une procédure administrative spécifique (voir chapitre relatif à la réglementation).
Cadre général
Un nouveau cadre réglementaire encadre l’utilisation d’eaux impropres à la consommation humaine (EICH) pour des usages domestiques.
Ce nouveau cadre réglementaire s’inscrit dans une volonté de simplification administrative nécessaire à l’adhésion des publics qu’il vise tout en veillant à prévenir les risques sanitaires associés à l’utilisation des EICH pour des usages domestiques. Il repose sur :
Le Décret n° 2024-796 du 12 juillet 2024 relatif à des utilisations d’eaux impropres à la consommation humaine -(legifrance.gouv.fr)
L’arrêté du 12 juillet 2024 relatif aux conditions sanitaires d’utilisation d’eaux impropres à la consommation humaine pour des usages domestiques pris en application de l’article R. 1322-94 du code de la santé publique - (legifrance.gouv.fr)
L’installation de systèmes d’utilisation des EICH est d’application volontaire et ne revêt pas un caractère obligatoire. Le propriétaire des réseaux intérieurs de distribution d’eau est responsable de la conduite des procédures et opérations concernant le système d’utilisation des EICH qu’il installe. Il doit veiller à respecter les exigences de conception technique, de surveillance, d’entretien et de maintenance définis dans la réglementation.
Ces nouveaux textes remplacent et complètent le cadre réglementaire préexistant de l’utilisation d’eaux impropres à la consommation humaine pour des usages domestiques. L’arrêté du 21 août 2008 relatif à la récupération des eaux de pluie et à leur usage à l’intérieur et à l’extérieur des bâtiments est ainsi abrogé au 1er septembre 2024.
Selon l’origine de l’eau, le type d’établissement et les usages domestiques envisagés, les démarches administratives à réaliser par le porteur de projet sont variables (aucune démarche / simple déclaration / autorisation / expérimentation) :
À noter que certains usages sont strictement interdits : utilisation des eaux vannes issues des toilettes pour le lavage du linge, lavage des sols en intérieur et alimentation des fontaines décoratives.
La procédure de déclaration relève de la responsabilité du propriétaire du système.
Afin de réaliser cette déclaration, un formulaire est disponible sur le site démarches-simplifiées.fr.
Lorsqu’il est complété et finalisé sur ce site, le formulaire est télé-transmis automatiquement vers les services du préfet et de l’Agence régionale de santé.
Cadre particulier applicable aux établissements recevant du public sensible
Dans l’enceinte des établissements recevant du public sensible, les systèmes d’utilisation des eaux impropres à la consommation humaine suivants requièrent une déclaration auprès du préfet :
Les systèmes alimentés par des eaux brutes issues du milieu naturel utilisées pour le lavage du linge et également celles utilisées pour l’alimentation de fontaines décoratives.
Pour les usages domestiques réalisés à partir de système alimenté par des eaux grises ou des eaux issues des piscines à usage collectif, une autorisation du préfet est requise.
Lorsqu’une autorisation du préfet est requise, les dossiers de demande d’autorisation sont adressés par les pétitionnaires au préfet de département qui saisit pour avis l’Agence régionale de santé (ARS). L’ARS instruit les dossiers de demande pour le compte du préfet.
Les pratiques de substitution de l’eau potable (eaux destinées à la consommation humaine) par des eaux non potables peuvent induire des risques sanitaires en regard de la présence de polluants de type microbiologiques et physicochimiques de ces eaux, notamment les risques suivants :
Risque d’exposition des personnes à des organismes pathogènes et des substances chimiques, dont risque d’exposition de personnes sensibles ou vulnérables
Risque de contamination des réseaux d’eau potable par interconnexion accidentelle des réseaux
Risque de développement de larves de moustiques vecteurs de maladies.
Ces risques peuvent survenir en cas de mauvaise conception ou en d’entretien défaillant des systèmes utilisant des eaux impropres à la consommation humaine.
Par exemple, si les usagers ne sont pas informés de la présence de robinets d’eau non potable ils peuvent les utiliser à des fins inappropriées, telles que l’alimentation ou l’hygiène corporelle, ce qui peut entrainer des maladies hydriques de type gastro-entérites.
Par ailleurs, un entretien insuffisant des réseaux peut altérer la qualité de ces eaux, notamment par la prolifération microbienne ou l’accumulation de polluants chimiques, exposant ainsi les usagers à des risques sanitaires lors d’usages domestiques autorisés.
En cas de mauvaise conception, d’absence ou d’erreur d’identification du réseau, des interconnexions non autorisées (branchement ou « piquage » sur les tuyaux ) peuvent entrainer des phénomènes de retour d’eau vers le réseau d’eau potable (par dépression lors de travaux sur le réseau public par exemple). Cela peut conduire à une contamination du réseau de distribution d’eau potable, exposant ainsi la population à des eaux impropres à la consommation et à des risques sanitaires, tels que des gastro-entérites.
Les retours d’expériences de "double réseaux" ont montré, tant en France qu’à l’étranger, que la séparation totale de réseaux ne peut être assurée à long terme et/ou à grande échelle dès lors qu’un double réseau existe dans l’habitat. Le développement à grande échelle de la récupération des eaux impropres à la consommation humaine dans l’habitat induit donc un risque de contamination de l’eau potable à l’échelle de l’habitat et à l’échelle d’une unité de distribution. L’information des usagers et la transmission de la connaissance de l’existence d’un réseau d’eau non potable sont donc primordiales pour éviter les mésusages de ces eaux et de ces réseaux.
Par ailleurs, le stockage de l’eau de récupération en cuve ou réservoir au sein des bâtiments peut engendrer des risques de prolifération de moustiques tigres vecteurs potentiels de virus tels que la dengue, le chikungunya et le Zika, ainsi que des risques de noyade pour les jeunes enfants (selon conception de la cuve).