Face à l’intensification de la circulation de la bactérie Bordetella pertussis en France et en Europe, Santé Publique France a publié le 29 juillet 2024, une actualisation de son point épidémiologique. L’ensemble des indicateurs suivis par SPF en ville et à l’hôpital montre que l’épidémie de coqueluche sur le territoire national, observée depuis début 2024, s'est intensifiée sur les derniers mois.
En termes de décès depuis début 2024, un total provisoire de 28 décès a été rapporté dont 20 enfants (18 âgés de moins de 1 an) et huit adultes (âgés de 51 à 86 ans mais dont la coqueluche n’était pas indiquée comme première cause de décès). Le plus grand nombre de décès a été observé en juillet avec 9 décès.
Tests PCR en Centre-Val de Loire
En Centre-Val de Loire, selon la cellule régionale de Santé Publique France sur les 12 derniers mois, 4 298 tests PCR ont été réalisées pour la recherche de coqueluche dans les laboratoires du réseau 3-labos dont 879 PCR positives (taux de positivité de 20 %). Les tests concernent toutes les catégories d’âges avec un niveau de positivité plus important chez les 1-24 ans (> 20 %). La majorité des test a été réalisée depuis le mois de d’avril avec une augmentation progressive jusqu’en juin. Depuis le début du mois de juillet, environ 1 100 ont été réalisés dans les laboratoires du réseau 3-labos pour un taux de positivité proche des 20 %.
Diagnostics aux services d'urgence en Centre-Val de Loire
Depuis le début de l’année 2024 et jusqu’en semaine 29, 132 cas de coqueluche diagnostiqués aux urgences ont été signifiés via le dispositif de surveillance Oscour®, avec une hausse à partir de la semaine 13. La plupart des cas (n = 104 ; 79 %) étaient âgés de moins de 15 ans. En semaine 29, 9 passages aux urgences pour coqueluche ont été enregistrés sur la région (dont 2 cas hospitalisés), un chiffre comparable à la semaine précédente.
A noter que sur l’ensemble des années 2022 et 2023, respectivement 2 et 9 cas avaient été signifiés sur la région.
Diagnostics SOS médecins en Centre-Val de Loire
En Centre-Val de Loire, depuis le début de l’année et jusqu’en semaine 29, 43 cas de coqueluche diagnostiqués à SOS Médecins ont été signifiés par les associations SOS Médecins de la région (Orléans et Bourges), avec une hausse à partir de la semaine 19. Quinze cas (35 %) étaient âgés de moins de 15 ans. En semaine 29, 8 actes SOS Médecins pour coqueluche ont été enregistrés sur la région, un chiffre comparable à la semaine précédente.
A noter que sur l’ensemble des années 2022 et 2023, respectivement 2 et 0 cas avaient été signifiés sur la région.
L'ampleur du pic et la durée de ce cycle épidémique ne sont pas prévisibles et si certains indicateurs semblent être à la baisse depuis le début du mois de juillet, l’interprétation doit être prudente car les données du mois de juillet ne sont pas encore consolidées.
La politique vaccinale contre la coqueluche en France vise à réduire les formes sévères, les hospitalisations et les décès liés à la coqueluche qui surviennent essentiellement chez les nourrissons de moins de 6 mois. Elle repose sur la primovaccination précoce des nourrissons dès qu’ils sont en âge d’être vaccinés, la vaccination des femmes enceintes ou la vaccination de la mère en post-partum et des personnes susceptibles d’être en contact étroit avec le nourrisson durant ses 6 premiers mois de vie (stratégie dite du cocooning).
Les personnes à risque de formes graves de coqueluche sont :
- les nourrissons non protégés par la vaccination,
- les personnes souffrant d'une maladie respiratoire chronique (asthme, broncho-pneumopathies chroniques obstructives...),
- les personnes immunodéprimées,
- les femmes enceintes.
Tout le monde peut être concerné par la vaccination contre la coqueluche. La vaccination a un triple intérêt :
- elle permet d’éviter d’attraper cette maladie très contagieuse,
- elle permet aux mères vaccinées pendant la grossesse de transmettre des anticorps et de protéger ainsi leurs nourrissons de moins de 6 mois, à un âge où ils ne sont pas protégés ou incomplètement protégés par leur propre vaccination,
- elle permet à l’entourage des nouveau-nés de diminuer le risque de transmission de la coqueluche aux nourrissons de moins de 6 mois, quand leurs mères n'ont pas été vaccinées pendant la grossesse. Cette stratégie de protection indirecte des petits nourrissons par la vaccination de leurs proches s’appelle le cocooning.
Ainsi face à la circulation de la coqueluche sur le territoire, la stratégie la plus efficace reste la vaccination anticoquelucheuse, telle que prévue au calendrier vaccinal :
- Des femmes enceintes à partir du deuxième trimestre de grossesse, en privilégiant la période entre 20 et 36 semaines d’aménorrhée, pour protéger le nouveau-né et le nourrisson jusqu’à ses 6 mois grâce au transfert actif transplacentaire des anticorps maternels,
- Des nourrissons avec la première dose dès 8 semaines, que la mère ait été vaccinée ou non durant la grossesse, et la deuxième dose à 4 mois, avec un rappel à 11 mois. Les infections mineures (rhinopharyngite, otite, bronchite ou diarrhée modérée par exemple) et/ou une fièvre de faible intensité ne doivent pas entraîner le report de la vaccination.
En l’absence de vaccination de la femme enceinte pendant la grossesse, une stratégie de cocooning par la vaccination doit être mise en place :
- Pour la mère en post-partum immédiat, avant la sortie de la maternité, même si elle allaite,
- Pour l’entourage du nouveau-né (parents, fratrie, grands-parents et autres personnes susceptibles d’être en contact étroit et durable avec le futur nourrisson au cours de ses six premiers mois). Lorsque la mère a été vaccinée pendant sa grossesse et qu’au moins un mois s’est écoulé entre la vaccination et l’accouchement, il n’est plus nécessaire de vacciner l’entourage proche du nourrisson.
De plus, dans son avis du 22 juillet 2024 relatif à la stratégie de vaccination contre la coqueluche dans le contexte épidémique de 2024 – Rappel vaccinal des professionnels au contact des personnes à risque de forme grave, la Haute Autorité de santé recommande :
- Pour répondre à la situation sanitaire actuelle, que l’entourage proche (quel que soit son âge) du nouveau-né/nourrisson reçoive une dose de rappel de vaccin dTcaP si la vaccination coquelucheuse antérieure date de plus de 5 ans (la durée de protection des vaccins acellulaires est en effet estimée entre 5 et 10 ans),
- Considérant la situation sanitaire actuelle marquée par une majorité des décès survenus chez des nouveau-nés et nourrissons de moins de 6 mois, l’administration d’une dose de rappel avec un vaccin dTcaP lorsque la dernière injection date de plus de 5 ans, pour tous les professionnels travaillant au contact des nouveau-nés et nourrissons de moins de 6 mois, notamment :
- les professionnels soignants des services de maternité, néonatalogie, de pédiatrie… ;
- les professionnels de santé en ville (médecins libéraux, kinésithérapeutes, PMI, etc.) ;
- les étudiants des filières médicales et paramédicales ;
- les professionnels de la petite enfance dont les assistants maternels ;
- les personnes effectuant régulièrement du baby-sitting.
De plus, la HAS préconise que les professionnels qui ne sont pas au contact des enfants de moins de six mois et qui souhaitent adopter une démarche volontaire de rappel puissent bénéficier d’une dose additionnelle si leur dernière injection date de plus de 5 ans.
Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a émis un avis en date du 30 juillet 2024 relatif à la prévention de la transmission de la coqueluche aux personnes à risque de forme grave.
Dans cet avis, le HCSP précise les définitions des sujets à risque de forme grave de coqueluche.
Sujets à haut risque :
- Nourrissons de moins de 6 mois quelles que soient les vaccinations de la mère ou de l’enfant,
- Nourrissons de 6 à 11 mois avec moins de 2 doses ou dont la dernière est inférieure à 2 semaines.
Les mesures de prévention sont justifiées chez ces personnes et chez les personnes en contact étroit avec elles (partageant le même domicile ou les prenant en charge).
Sujets à risque :
- Personnes présentant une maladie respiratoire chronique, obésité ou déficit immunitaire ;
- Personnes âgées de plus de 80 ans.
Les mesures de prévention sont justifiées chez ces personnes mais pas pour les personnes en contact étroit avec elles.
Le HCSP recommande la limitation des antibioprophylaxies désormais circonscrites :
- Aux sujets à haut risque de forme grave et aux personnes au contact avec eux (domicile, travail…) ;
- Aux sujets à risque de forme grave ;
- À des situations particulières de clusters ;
- Le délai après le dernier contact est réduit à 14 jours.
La fiche mémo de la HAS sur les choix et durées d’antibiothérapies dans la prise en charge de la coqueluche chez le nourrisson, l’enfant et l’adulte a été actualisée le 5 août pour prendre en compte les nouvelles recommandations du HCSP.
Par ailleurs le HCSP recommande la promotion des mesures barrières (lavage des mains et port du masque) et la promotion de la vaccination intégrant les dernières recommandations de la HAS. Il est notamment recommandé aux professionnels de santé de porter un masque lors de l’examen d’un nourrisson trop jeune pour avoir reçu deux doses de vaccins et ce, même si la mère est vaccinée et en cas de rappel chez le professionnel de santé effectué dans les 5 ans.